Un article à propos du livre "Amour vache" dans Art press juillet 2021

Amour vache Eretic-art, 112 p., 18 euros

Cet ouvrage compile une sélection de peintures et de dessins d’Anne Van der Linden de 2015 à 2020, artiste qui apparaît au début des années 1990, dans le sillage de Bruno Richard et Pascal Doury, créateurs d’Elles sont de sortie à la fin des années 1970 et initiateurs du genre avec Bazooka – en plus trash – et, simultanément, avec le collectif le Dernier Cri de Pakito Bolino et Caroline Sury, maison d’éditions sérigraphiques sous toutes les formes. Combas, les Di Rosa, Boisrond et Blanchard, fondateurs de la Figuration libre, propulsent en pleine période d’art conceptuel et abstrait réfractaire à toute représentation, une figuration décomplexée, grotesque, nourrie à l’imagerie de la contre-culture. Van der Linden développe dans cet esprit des dessins que l’on pourrait rapidement qualifier de « toporien » : hachurés et vifs. Dans ces années 1980, elle rencontre Jean-Louis Costes : ils créent la revue underground la Vache bigarrée. L’ancien architecte devenu performer et créateur d’opéras trash lui demande alors de réaliser les décors de ses spectacles. L’art de Van der Linden étant plutôt catalogué du côté de l’illustration, elle ne fraye pas avec les peintres de sa génération et survit dans les circuits parallèles, dans la catégorie qualifiée d’« outsider » par les étiqueteurs de tiroirs. Et il faut aussi se rappeler qu’au début des années 1990, peindre était considéré comme réactionnaire par l’Institution et ses serviteurs – distributeurs de bons points. Ses peintures rappellent l’art du vitrail : cerne noir, couleurs sourdes mais à la fois lumineuses, espaces simplifiés. Il y a aussi un je-ne-sais-quoi de mexicain, ou plutôt d’américain du sud. Certainement à cause de leur proximité avec les ex-voto païens – à la sauce de l’imagerie religieuse tirée des divers martyrologues.

Philippe Ducat pour Art press
29 janvier 2023 |

1 / 142 Suivant